Van Gogh a toujours été fasciné par le ciel nocturne qu'il parvient enfin à représenter.

 

Terrasse du Café de la Place du Forum à Arles, la nuit. 1888

Le flamboiement argenté de la nuit étoilée préoccupe Van Gogh depuis longtemps, mais cette toile est la première représentation nocturne qu'il parvient à fixer. " Une immense lanterne éclaire la terrasse, la devanture, le trottoir ", écrit-il à Gauguin. Grâce aux bleus du ciel, des habitations surplombant la terrasse, de la rue, de la porte et même ceux des pavés, il parvient à créer une impression d'intimité chaleureuse au cœur des ténèbres. Les feux d'un fiacre dans le lointain et les fenêtres éclairées rappellent la présence de la nuit. La lampe jaune du café projette des disques colorés sur les tables, fait rayonner mur et tenture, lance ses étincelles dorées jusque sur les serveurs et les passants, tandis qu'une sorte de gouffre noir aux lignes fuyantes envahit le centre du tableau. Le traitement synthétique des différentes nuances de couleur est audacieux. " Là, tu as un tableau nocturne sans noir, mais seulement d'un beau bleu, avec du violet et du vert et, dans cet entourage, la place éclairée devient jaune soufre pâle et vert citron ", écrit-il encore.

 

 

Nuit étoilée sur le Rhône 1888

Le ciel nocturne fascine depuis toujours le peintre, passionné d'astronomie et d'astrologie, qui se demande : " Mais quand donc ferai-je le ciel étoilé, ce tableau qui, toujours, me préoccupe ? " Van Gogh y parvient en septembre 1888, en peignant la nuit sous un bec de gaz. Vision hallucinatoire ou réaliste ? Quoi qu'il en soit, le lendemain, il écrit à son frère Théo : " Le ciel est bleu-vert, l'eau est bleu de roi, les terrains sont mauves. La ville est bleue et violette, le gaz est jaune et des reflets or roux descendent jusqu'au bronze vert. Sur le champ vert du ciel, la Grande Ourse a un scintillement vert et rose dont la pâleur discrète contraste avec l'or brutal du gaz. Deux figurines colorées d'amoureux à l'avant-plan. " Fourmillant de corps stellaires, le ciel calme d'un bleu de cobalt qui se reflète dans les eaux sombres du fleuve semble palpiter. Un réseau d'étoiles domine la composition de ce chef-d'œuvre, illustration d'une rêverie.

 

Nuit étoilée à St Rémy 1889

Un ciel bleu profond avant l'aube, vers quatre heures du matin, avec une lune orange décroissante et son auréole. Un réseau très graphique d'étoiles blanches et jaunes, orange et bleues, semble palpiter et faire jaillir une étrange spirale, nébuleuse qui s'enroule sur elle-même, pleine d'énergie cosmique en volutes. " Certaines étoiles sont citronnées, d'autres ont des feux roses, verts, bleus, myosotis ", écrit-il à sa sœur. Des champs de blé et des oliveraies entourent les maisons d'un hameau endormi. La flèche d'une église dépasse à peine l'horizon, tandis qu'un cyprès aux formes convulsées domine l'ensemble de la composition. Le pinceau semble saisi d'un emportement impulsif. Et pourtant. La vision n'est pas véritablement hallucinée, bien au contraire. Grâce à des contraintes stylisées, à des exigences de liberté et à la précision géométrique du trait cernant les demeures, Van Gogh a voulu " nous faire arriver à créer une nature plus exaltante et plus consolatrice que [...] le clin d'œil seul sur la réalité ", dit-il. Merveille des merveilles. Dans cette toile très prenante, à mi-chemin entre réalisme et fiction, l'artiste a délibérément conçu pour notre plaisir " des exagérations au point de vue de l'arrangement, avec des lignes contournées comme celles de bois anciens ".